En France, en 2022, 16% des étudiants ont eu un engagement bénévole associatif, principalement dans les secteurs du sport, de la culture, le social et l’environnement1.  Depuis plusieurs années, ce chiffre reste stable alors que l’on sait l’importance et les vertus que revêt cet engagement pour les étudiants et pour les structures d’intérêt générales qui les accueillent – associations, fondations, établissements publics –  mais aussi pour la société dans son ensemble. 

L’engagement bénévole participe au parcours citoyen et professionnel des étudiants et étudiantes.  Il leur permet de gagner en maturité sur les grands sujets de société, de vivre une première expérience (qui est bien souvent une première ligne à leur CV), de renforcer leur savoir-être et savoir-faire – leur “soft skills” –  dont le sens des responsabilités, l’empathie,  la communication, la résolution de problème et la capacité à travailler en équipe. Cette expérience est également propre à impacter leur parcours d’orientation notamment en ouvrant les étudiants au secteur de l’économie sociale et solidaire qui représente 10% du PIB et 14% des emplois en France2

Pour les associations, les fondations et les différentes structures d’intérêt général qui accueillent les étudiants, cela permet de contribuer à la création d’une nouvelle génération de jeunes engagés tant bénévolement (dans un contexte où il y a 2 millions de bénévoles en moins entre 2018 et 2022 3)  que dans leurs futurs emplois ou créations d’activité (57% des jeunes qui entrent sur le marché du travail seraient intéressés par le fait de travailler dans l’économie sociale et solidaire4).

L’engagement bénévole étudiant présente un intérêt pour tous. Il permet de faire lien. Un lien entre personnes d’horizon et d’origines sociales différents, lien intergénérationnel. Il permet de faire du monde associatif et de l’économie sociale et solidaire un catalyseur de citoyenneté et d’inclusion.  

Une jeune étudiante aux cheveux noirs, vue de dos, est en train de ranger des produits dans une épicerie solidaire. Elle porte un gilet sur lequel est inscrit "Épicerie Solidaire".

L’ENGAGEMENT CITOYEN ÉTUDIANT EN FRANCE

La Loi Égalité et Citoyenneté et le Décret du 10 mai 2017 relatif à la reconnaissance de l’engagement des étudiants dans la vie associative, sociale ou professionnelle reconnaissait le droit pour chaque étudiant de faire reconnaître son engagement au sein de son cursus. Chaque établissement, en plus des possibilités d’aménagement de cursus,  doit proposer un mode de validation des compétences ainsi acquises par l’étudiant (attribution d’ECTS, bonus,…).

Si cette loi et la dernière circulaire ont été une avancée importante et ont permis à de nombreux étudiants de valoriser les compétences acquises par ce biais, tout comme l’avait été la Loi du 10 mars 2010 relative au service civique, elles n’ont pas suffi à impulser un changement systémique en légitimant massivement l’engagement comme un moyen d’être utile à la société en acquérant des compétences nécessaires à leurs parcours de formation et d’insertion.

Si l’idée d’acquisition de compétences complémentaires au cursus par l’engagement est aujourd’hui largement acceptée, les modalités de validation restent un casse-tête pour la plupart des étudiants, voire les pénalisent. Les établissements d’enseignement supérieur n’ont pas aujourd’hui de moyens dédiés à cette mission ni de système de validation harmonisé et accessible à tous.

La volonté d’engagement des étudiants est réelle  et leur passage à l’action est de plus en plus important dès lors qu’on leur propose un cadre adapté et intégré à leur études5, et celle des lycéens aussi. Il est de notre responsabilité de faciliter cet engagement en le reconnaissant comme un élément essentiel de notre réponse aux ODD.

Certains établissements d’enseignement supérieur français ont initié la mise en place de dispositifs pédagogiques permettant de généraliser l’engagement citoyen à tous leurs étudiants :

Sciences Po Paris – Le parcours civique de Sciences Po est un programme obligatoire pour tous les étudiants du premier cycle d’études à Sciences Po, qui vise à les former à la citoyenneté et à la promotion de l’égalité et de la solidarité. Le programme est constitué d’un stage civique, d’un projet civique libre à vocation sociale et solidaire (de 60 heures sur toute l’année), et d’un rapport du parcours civique à rédiger pendant les trois ans de bachelor. 

Écoles du groupe OMNES éducation – En 2021, le groupe OMNES éducation a lancé le programme PACT (Programme d’action citoyenne de terrain) destiné à 2000 étudiants de 1re année de 5 écoles dans 4 villes (Paris, Lyon, Bordeaux et Rennes). Dans le cadre de PACT, les étudiants effectuent 30 heures de bénévolat au sein de structures d’intérêt général. A lui seul, ce programme comptabilise 60 000 heures de bénévolat étudiant par an. Le programme est obligatoire et est sanctionné par l’octroi de 1 à 3 ECTS (en fonction des écoles).

EMLyon – En 2021, EMLyon a lancé son Programme d’engagement responsable. Pour le valider, les étudiants doivent effectuer 40 heures de bénévolat dans une association étudiante de l’école ou dans une association extérieure.

HEC Paris – À la rentrée 2023, dans le cadre de son parcours “Engagement”, HEC a mis en place un module “Engagement Citoyen” obligatoire pour ses étudiants de 1re année. Au cours du premier semestre, ceux-ci doivent réaliser 30 heures de bénévolat au sein de structures d’intérêt général. Le parcours est sanctionné par la réalisation d’un mémoire. 

Université Aix-Marseille – Dans le cadre de son programme IDeAL, l’Université d’Aix-Marseille propose à tous ses étudiants de s’engager dans des projets d’intérêt général et de bénéficier d’un accompagnement personnalisé pour mener à bien leur projet. Les étudiants peuvent valoriser leur engagement dans le cadre de leur parcours académique.

Université de Strasbourg Le Diplôme Universitaire d’Engagement étudiant (DUEE) de l’Université de Strasbourg reconnaît et valorise l’engagement étudiant. Afin d’obtenir leur diplôme, les étudiants doivent effectuer une mission de bénévolat de 50 heures au moins. Le diplôme est sanctionné par l’octroi de 6 ECTS.

Université de Nanterre – A la faveur du projet So skilled, l’unité d’enseignement “Activités solidaires et engagées” a été créée. Cette dernière est insérée dans le cursus de chaque étudiant, au moment jugé opportun par chaque UFR. Elle permet à l’étudiant de valider 3 crédits ECTS en valorisant une expérience extra curriculaire au sein d’associations partenaires. 


DISPOSITIFS EXISTANTS DANS D’AUTRES PAYS

Plusieurs pays ont mis au point des dispositifs qui systématisent le bénévolat des étudiants dans le parcours d’enseignement supérieur. 

Le Service à la communauté du CEGEP (Canada, QC) – Les CÉGEPS sont un élément clé du système éducatif du Québec, c’est le passage obligé pour accéder à l’université ou au marché du travail. Dans le cadre du diplôme d’études collégiales (DEC) délivré par les CÉGEP, les étudiants doivent effectuer un minimum de 30 heures de service communautaire. Les étudiants peuvent choisir l’organisme ou l’association dans lequel ils souhaitent s’engager et peuvent effectuer leur service pendant ou en dehors des heures de cours. 

Le Community Engaged Learning (CEL) de l’University of San Francisco (US) – Dans le cadre du Community Learning Course, les étudiants doivent réaliser une mission bénévole (community service) d’un minimum de 20 heures. Le Community Learning Course est obligatoire, il est sanctionné par l’attribution de 4 ECTS et sa validation conditionne l’obtention du diplôme final décerné par l’Université de San Francisco6.

Service-Based Learning (SBL) program de la Strathmore University  (Kenya) – 

Dans le cadre de leur service-based learning program, les étudiants doivent effectuer 200 heures de bénévolat7. Le programme SBL est obligatoire pour tous les étudiants et conditionne l’obtention du diplôme.

Community Service de la Singapore Management University (Singapour) – Dans le cadre de ce community service (SMU) les étudiants doivent effectuer 80 heures de bénévolat. La validation de ces heures conditionne l’obtention du diplôme. Avant de débuter leur mission bénévole, les étudiants doivent suivre cinq heures de formation8.  Le programme permet de susciter plus de 2,9 millions d’heures de bénévolat étudiant par an au profit de structures d’intérêt général.


NOS PROPOSITIONS POUR LA GÉNÉRALISATION DE L’ENGAGEMENT CITOYEN ÉTUDIANT EN FRANCE

Parce que nous considérons que les compétences principales acquises par l’engagement sont utiles à tous dans leurs parcours de formation et parce que nous considérons que leur acquisition doit être accessible à tous,  nous proposons à tous les établissements d’enseignement supérieur français de mettre en place un parcours d’engagement citoyen9 à destination de tous leurs étudiants de premier cycle. Ce parcours devra prévoir la réalisation d’une mission citoyenne bénévole d’au moins 40 heures sur un ou deux semestres.

Nous demandons aux pouvoirs publics d’accompagner cette proposition :

  • en donnant un cadre normatif à la généralisation des parcours d’engagement citoyen dans le premier cycle de l’enseignement supérieur (référentiel de compétences commun, modalités de validation harmonisées).
  • et en garantissant que les établissements d’enseignement supérieur, notamment les universités, aient les moyens financiers et humains d’organiser ces parcours. 

    BÉNÉFICES LIÉS À LA GÉNÉRALISATION DES PARCOURS D’ENGAGEMENT CITOYEN – EXEMPLES

  • Lutte contre les inégalités éducatives

    Dès les premières années, la généralisation des parcours d’engagement citoyen étudiant permettra aux structures qui luttent contre les inégalités éducatives et le décrochage scolaire de proposer des “mentors” à tous les jeunes qui en ont besoin .

  • Aide alimentaire

    Les associations de lutte contre la pauvreté pourront immédiatement compter sur le renfort de milliers d’étudiants pour multiplier les collectes de denrées alimentaires et de produits de première nécessité.

  • Isolement social des personnes âgées

    Face aux défis du vieillissement de la population, les associations de lutte contre l’isolement des personnes âgées pourront mobiliser des milliers d’étudiants pour rompre la solitude d’un plus grand nombre de personnes âgées.

  1. France Bénévolat ,  L’évolution de l’engagement bénévole associatif en France, de 2010 à 2022, p.10 ↩︎
  2. Ministère de l’économie et des finances, Économie Sociale et Solidaire ↩︎
  3. France Bénévolat ,  L’évolution de l’engagement bénévole associatif en France, de 2010 à 2022, p.6 ↩︎
  4. Baromètre « Talents : ce qu’ils attendent de leur emploi », Ipsos, BCG & CGE, 2023 ↩︎
  5. Par exemple, grâce à la mise en place de ses dispositifs intégrés aux parcours universitaires, l’AFEV à constaté un doublement du nombre d’étudiants bénévoles en 2022.  doublement du volume de bénévoles étudiantes de l’Afev en 2022. ↩︎
  6. Community Engaged Learning (CEL) ↩︎
  7. Service-Based Learning: Going Beyond Academics ↩︎
  8. Community Service | Singapore ↩︎
  9. Les étudiants auront la possibilité de valider les compétences demandées par d’autres moyens à définir (entrepreneuriat social, accomplissement d’un service civique, engagement comme sapeur-pompier volontaire). ↩︎